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mercredi 9 janvier 2019

A propos de quelques objets conservés au musée d'art populaire de Loutra

En 1840 les Jésuites de Tinos abandonnèrent leur maison d'Exombourgo pour s'installer à Loutra. Leur nouveau monastère, où ne réside plus aujourd'hui qu'un seul Père, comprend un vaste enclos nourricier, une église, un ensemble de 15 chambres, une vaste cuisine, un salon de réception, une bibliothèque et un atelier dans lequel étaient préparés les produits agricoles destinés aux besoins de la communauté, qui comme tout le monde à Tinos, vivait dans une quasi autarcie.
C'est dans cet atelier que les Jésuites ont rassemblé autour d'un moulin à olives et d'un pressoir, de nombreux objets qui témoignent du travail et de la vie quotidienne des Tiniotes. On ne peut que saluer leur souci de préservation et de mise à la disposition du public du patrimoine paysan.

Les outils du laboureur

On trouve à Tinos deux types d'araires, une grande, destinée au travail des champs et une petite adaptée au travail des jardins. Toutes deux sont construites en bois dur et sont équipées d'un soc amovible, susceptible de passer à la forge; beaucoup de bois et peu de métal, produit cher venu de loin !


Debout contre le pilier on remarque le joug, très simple, qui unissait la paire de boeufs et les différents types de houes. La bêche, mal adaptée aux sols durs, semble inconnue.


Enfin la herse de bois, munie de petites dents de fer.



De tels outils permettent seulement d'égratigner la terre mais sont légers et susceptibles d'être transportés sur les terrasses difficiles d'accès. Ils sont les témoins de cette agriculture méditerranéenne pauvre, aux rendements faibles, aux fréquentes jachères. On ne cultivait pas de froment mais des céréales rustiques, seigles, épeautres. On trouve toujours ces graminées à l'état sauvage en se promenant dans l'île.

La presse à fromage, en marbre, permettait l'écoulement du petit lait et la fabrication de la féta locale, le mastelo..


On remarquera la croix simplement gravée sur la pierre : le matériel et le spirituel sont étroitement associés.

Le bât de l'âne renvoie à la nécessité de se déplacer de parcelle en parcelle; telle partie du terroir est favorable à la vigne ou aux oliviers, telle autre aux emblavures et les montagnes servent de pacage. Le paysan monté sur son âne porteur de couffins constitue une image traditionnelle qui n'a pas encore totalement disparu.


Les paniers de fabrication locale - la spécialité de Volax - permettaient de tout transporter à l'exception des liquides. Il en existe de toutes tailles ! Leur armature est en bois de gattilier, leur tissage en osier de Volax.


Pour stocker ou transporter les liquides ou produire des ruches on fait appel à la céramique, également très diverse et adaptée aux usages spécifiques, ainsi ces jarres de Marseille vernissées utilisées pour conserver l'huile d'olive. On trouve à Gastria, tout à côté de la mer d'où venait le combustible des fours de potier encore en place et une multitude de tessons !

Jarres de Marseille
Ruche traditionnelle
A ces objets paysans le musée associe des marbres architecturaux en provenance de la ville d'Exombourgo, l'ancienne capitale de l'île, et une collection d'appareils de projection issue de l'activité de catéchèse des Pères.
Surtout, on a conservé en place le moulin à olives de la communauté. Je lui consacrerai un article de ce blog.  

lundi 6 février 2017

Maisons paysannes de l'Exomeria

L'Exomeria est la région du nord de Tinos. Littéralement, le mot signifie "partie en dehors". En effet l'Exoméria est séparée du reste de l'île par la chaîne de Pateles et on y accède par des cols. De ce fait la région n'est pas dominée par la forteresse d'Exombourgo et un gros village, Pyrgos (à l'époque vénitienne La Torre) fait figure de chef-lieu.
Au sud-est du bassin de Pyrgos la montagne dégringole dans la mer, créant ainsi des pentes raides très exposées au redoutable vent du nord, le Vorias. Fortes pentes et exposition au vent se conjuguent pour rendre cette zone défavorable à l'occupation humaine. Aussi a-t-elle été abandonnée par les habitants dans les décennies qui encadrent le second conflit mondial.
Il n'y avait pas de villages dans cette zone austère mais une multitude de hameaux composés de maisons occupées en permanence ou lors des gros travaux des champs par les paysans et les bergers : Karaboussa, Agios Antonios, Agia Paraskevi, Koris Pyrgos, le seul qui revive maintenant, du moins en été, etc., toujours localisés près d'un point d'eau. Car l'eau qui descend de Pateles abonde.

Le hameau de Karaboussa


Ce sont les restes d'habitats et les témoignages de l'activité agricole ancienne qui vont maintenant nous intéresser.



Les maisons, ou mieux les katikiès, ces maisons de plain-pied servant d'abri temporaire sont le plus souvent construites comme les bergeries : les murs "grossissent" au sommet et c'est là que l'on pose horizontalement les grandes lauzes qui forment le toit.




A l'intérieur on va systématiquement trouver un foyer toujours remarquablement bien construit et tout à côté des niches pratiquées dans la maçonnerie. Ces niches servaient de placards pour les provisions et le matériel de cuisine. A l'extérieur la cheminée est un simple trou parfois couvert d'une jarre percée pour améliorer le tirage.

Et un lit de pierre pour tout meuble !


Très souvent on trouve aussi un pressoir par foulage, le patitiri  et un rakizio, c'est à dire le réfrigérant de l'alambic dans lequel on fabriquait le marc local, le raki. Chaque famille faisait en effet son vin et son alcool.


Le pressoir par foulage se compose d'une cuve de pierre dans laquelle on dépose les grappes et d'un bassin pour l'écoulement du moût. On se déchausse et on foule aux pieds !


Les rafles fermentées sont distillées dans l'alambic familial, en cuivre et parfois en poterie. Le nez de l'alambic était plongé dans un réservoir d'eau formé de plaques savamment maçonnées pour assurer la condensation des vapeurs chargées d'alcool.


Au dehors, des bergeries, bien sûr et des aires à battre le grain, les alonia. Les ânes écrasaient les épis moissonnés à la faucille et extrayaient ainsi les grains qui étaient séparés du son par le grand vent de l'Exoméria.


Souvent aussi des loges de ruches avec parfois des ruches locales de terre cuite conservées.


Enfin des objets de la vie rurale traditionnelle, comme cette pierre taillée pour entraîner l'écoulement du petit lait ou cet abreuvoir creusé dans la pierre. Des objets simples et émouvants.





Après avoir visité Pyrgos et dégusté du galaktoboureko dans un des cafés de la place du Platane n'hésitez-pas, bien chaussés, à vous engager sur les sentiers presque inconnus de l'Exoméria !


mercredi 1 février 2017

Moulins à eau de Tinos

Des moulins à eau dans les Cyclades ? Impossible, trop sec ! Pourtant j'en connais deux à Tinos, dans le village d'Agapi, un dans celui de Perastra, un près de Lychnaftia et je vous invite à découvrir les vestiges d'un moulin récemment découvert qui se trouve sur le ruisseau de Falatados, entre le village et le lieu-dit Manganari.
Expatrié en Grèce
Bien sûr il n'y a pas à Tinos de rivière motrice digne de ce nom et l'ingéniosité paysanne a dû inventer une forme particulière de moulin dont les caractéristiques principales sont :
- un vaste bassin de rétention des eaux;
- une grande hauteur de chute, qui permet à l'eau d'agir par sa vitesse acquise et par son poids;
- une roue à axe vertical et à augets -comme souvent en Méditerranée- qui reçoivent directement le choc de l'eau venant du conduit de chute. Une ancêtre de la roue Pelton !

Le bassin de rétention
A Falatados le bassin de rétention est une enceinte maçonnée, autrefois crépie (il reste des traces d'enduit) pour l'étanchéité. Le sol du bassin est couvert d'argile imperméable. Cette enceinte est liée à un ruisseau minuscule, intermittent, affluent de celui du fond de la vallée. Evidemment, le bassin se remplissait en hiver et au printemps et son eau était conservée jusqu'à la moisson. Juste au dessus du conduit de chute, on trouve la vanne de pierre.


Le conduit, que l'on peut assimiler à une moderne conduite forcée, est en pierre et soigneusement enduit. Cet enduit est bien conservé.


A proximité des augets de la roue, le conduit se resserre. Malheureusement la roue n'existe plus. Sans doute était-elle construite en bois, avec le minimum de parties métalliques.
Mais son axe est encore là.
Au dessus de la chambre de la roue, les meules à farine en pierre volcanique (Santorin, Milos ?) sont toujours en place.

La chambre des meules


Le tout est complété par un déversoir : les eaux rejoignaient ainsi leur exutoire, le ruisseau de Falatados.

Fabuleuse Tinos si riche de son patrimoine paysan ! Tout près de là, une fontaine ruinée et son indestructible colonne...


jeudi 19 janvier 2017

Pour un écomusée à Tinos

Promouvoir dans l'île un tourisme durable, éviter la "myconiotisation" de Tinos, favoriser la découverte intelligente de son patrimoine naturel et culturel, tels pourraient être les buts d'un écomusée à Tinos.


Expatrié en Grèce
A l'initiative du Père Joyeux, des Jésuites de Grèce et d'un groupe d'amis franco-grec, j'ai repris ma casquette de conservateur. Voici le texte d'intention, rédigé en novembre 2016. N'hésitez-pas à réagir et à enrichir la réflexion engagée !




POUR UN ECOMUSEE DANS L'ÎLE DE TINOS


Tinos est une île miraculeusement préservée de l'archipel des Cyclades d'où se dégage une force extraordinaire. Elle fait présentement l'objet d'une communication insistante dans les médias d'Europe du nord, ce qui constitue à la fois un atout et un danger :
– un atout parce que de nombreux visiteurs étrangers enrichiront globalement l'île et susciteront des échanges de tous ordres ;
– un danger parce que l'actuelle préservation des patrimoines naturel et culturel de Tinos ne résistera pas au tourisme de masse. Tinos dans ce cas évoluera vers le modèle touristique purement marchand et mondialisé qui domine à Myconos, Santorin et Paros.
Conserver l'atout et écarter le danger, telle est la question. Elle peut être résolue positivement par l'adoption raisonnée d'un modèle original, le tourisme durable. Cela suppose une approche respectueuse des hommes, de l'environnement au sens large, une grande ouverture d'esprit et beaucoup de modestie. Je pense pour ma part que la découverte du patrimoine tiniote grâce à un réseau de sentiers pédestres organisés dans le cadre d'un écomusée peut partiellement résoudre l'équation en attirant des touristes avides d'échanges de qualité avec une population et un territoire et non pas seulement de soleil et de plages aménagées. On dit en français courant que l'on « fait » les îles grecques. Quelle erreur, quel toupet ! On ne fait pas Tinos, on la mérite.

 Le concept d'écomusée

Georges- Henri Rivière 1897 – 1985 anthropologue et muséologue, fondateur en 1937 du musée national des arts et traditions populaires dont il assure la direction jusqu'en 1967. Rénovateur de la pensée muséologique grâce concept d'écomusée qui se développe en France et dans le monde à compter des années 1970, porté par l'organisation internationale des musées, l'ICOM.
Une tentative d'explication globale d'un territoire 

L'écomusée envisage l'explication globale d'un territoire en favorisant la découverte et la compréhension de l'environnement naturel, de biotopes humains et de pratiques culturelles propres à ce territoire ; il faut noter qu'une île est le territoire idéal de l'écomusée. Les fondements de l'écomusée :
 – Un lieu central qui rassemble et délivre une information de bonne qualité scientifique sur le territoire, ses patrimoines naturel et culturel et invite à la découverte ;
– La découverte in situ du patrimoine naturel et culturel ;
– Une gestion démocratique partagée entre élus, porteurs de projet et population.

Tinos aujourd'hui, brève tentative d'état des lieux

Tinos, entre immobilisme et séduction du modèle myconiote
– Le pèlerinage de la Panagia Evangélistria, est source de richesse mais aussi d'immobilisme : la dévotion à la Vierge de Tinos amène dans l'île des pèlerins venus de toute la Grèce et génère un chiffre d'affaire de 8 M. d'EUR par an ! Pour les Tiniotes c'est une rente de situation. Et une bonne raison de ne pas bouger.
– La proximité de Myconos, île mondialisée et bétonnée dont le modèle économique est basé sur le fun, le tourisme de masse et la communication par les peoples séduit plus d'un Tiniote attiré par l'argent facile ! L'application du modèle myconiote est à redouter : il détruirait Tinos et modifierait jusqu'à la sociabilité des habitants (à Myconos on parle anglais, à Tinos on parle grec et souvent tiniaka, le dialecte local, à Myconos on paie, à Tinos on sourit). Attention, une société chinoise a acquis récemment la plage de Kalivia, près de Kardiani...

Un désir d'autre chose ? Voici quelques éléments de réflexion
Un patrimoine naturel et culturel de première importance :
– patrimoine géologique ;
– patrimoine botanique et faune ;
– patrimoine culturel et spirituel abondant et lisible : la modernité (routes carrossables, électricité, téléphone, etc.) n'atteint les villages que dans les années 1970, laissant au bord des sentiers un patrimoine considérable, vrai témoin de l'ancienne économie paysanne. Voir le blog ensoleillé de Tinos : http://leblog.maisondeloutra.fr/2013/11/vestiges-de-la-vietraditionnelle.html

Une histoire riche et révélatrice dont les points forts sont :
– les civilisations de la Grèce antique, de l'époque archaïque à l'époque hellénistique ;
– l'époque vénitienne ;
– le néo-hellénisme, autour du sanctuaire de la Panagia, où se mêlent les symboles de la piété orthodoxe et du jeune Etat grec ;

Une volonté de valorisation portée par une partie significative de la population :
– des initiatives privées de conservation du patrimoine : restaurations de pigeonniers (Marouli Tarampados), constitution de collections d'objets de la vie rurale traditionnelle par des particuliers ;
– des initiatives associatives : certaines associations de village (syllogoi) collectent des objets et organisent leur valorisation, comme à Volax, Kardiani ou Aetofolia autour de la poterie traditionnelle
– des initiatives institutionnelles, telle les excellentes collections formées par les Jésuites à Loutra ou par l'évêché catholique à Xinara ;
– enfin des initiatives publiques : le tout récent musée du marbre de Pyrgos, les collections d'art populaire d'Agia Triada à Girla ou le musée archéologique de Chora dont les collections rendent compte des fouilles de Vryokastro, d'Exombourgo et du sanctuaire de Poséidon à Kionia .

Une volonté de connaissance portée par des érudits autour de la revue Tiniaka Analekta : le P . Markos Foskolos, historien, Alekos Florakis, anthropologue, Charis Koutelakis, archéologue et enseignant à l'Université du Pirée.

Un lieu magique qui concentre l'histoire de l'île et fonctionne comme un aimant pour les insulaires et pour les visiteurs étrangers, le nid d'aigle d'Exombourgo qui porte les vestiges de l'ancienne capitale, de la citadelle vénitienne et le sanctuaire jésuite du Sacré-Coeur. De là on domine la mer Egée et tous les villages de Tinos, à l'exception de la région de Pyrgos. Capitale vénitienne de l'île, forteresse latine Exombourgo protégeait Tinos, permettait l'accès au port de San Niccolo (Chora) et à tous les villages. Une puissance tutélaire ! Voir le blog ensoleilléde Tinos : http://leblog.maisondeloutra.fr/2015/03/exombourgo.html

Un écomusée à Tinos

Il pourrait s'appuyer sur trois piliers conceptuels et matériels - centre d'interprétation, sentiers entretenus et informés, renvoi sur les institutions et/ou ressources conservant des collections ou des pratiques (vannerie, poterie, etc.) - et sur une structure démocratique de gestion. Et bien sûr sur un solide site Internet avec version mobile et référencement soigné.
Le centre d'interprétation Situé à Exombourgo, 
il pourrait contenir une analyse historique de l'île abondamment illustrée et une information sur le lieu lui-même : citadelle, ville, faubourg (sobborgo en italien, qui a donné Exombourgo en grec) invitant à sa découverte. La forme matérielle du centre d'interprétation est à inventer. Il doit communiquer et informer, être en consonance avec le lieu. Je l'imagine dehors, en position d'accueil. Une salle d'expositions temporaires aménagée à peu de frais dans les bâtiments existants permettrait de mettre en valeur tel ou tel point du patrimoine de Tinos : pigeonniers, ex-voto, chapelles, fresques...et de développer des ateliers pédagogiques créatifs.
Le réseau des sentiers 
C'est le pilier principal. Les routes asphaltées de l'île sont récentes. Avant les années 1950 – 1970 les échanges entre ville et villages, entre villages et parcelles cultivées étaient effectués à pied ou à dos d'âne grâce à des sentiers souvent dallés ou taillés dans le roc, clos de murs de pierres sèches afin d'empêcher les divagations des vaches, des chèvres et des moutons. Ces sentiers existent toujours et certains sont portés sur la carte Anavasi (équivalent grec de nos IGN 1/25000). Mais la plupart, du fait de l'exode rural et de la raréfaction des déplacements utilisant des animaux de bât, sont envahis par la végétation agressive qui les obstrue et rend la marche lente et difficile. Malgré cela les sentiers de Tinos offrent au promeneur leur diversité, leur beauté, leurs escaliers doux au pas, leurs dalles énormes posées là depuis des siècles par le labeur paysan. Marcher à Tinos est un plaisir en soi, plaisir physique auquel on peut relier la jubilation d'apprendre ! Les sentiers livrent l'accès à l'essentiel du patrimoine paysan de Tinos, aux terroirs, aux bâtiments de l'ancienne polyculture nourricière, aux églises rustiques : cultures en terrasse, olivettes, vignobles et jardins, plantations de mûriers, étables et bergeries, moulins à eau et surtout à vent, fontaines, réseaux d'irrigation, pigeonniers, aires à battre le blé, maisons temporaires utilisées par les paysans lors des gros travaux (katikiès), chapelles orthodoxes ou catholiques construites pour remercier Dieu de ses bienfaits. Ils relient entre eux les villages, tous différents et dont les édifices remarquables pourraient être commentés : maisons seigneuriales, églises, beaux tympans de marbre sur les maisons traditionnelles, fontaines publiques, etc. Ils donnent aussi accès aux richesse naturelles, filons de marbre, roches métamorphiques, rochers de granit érodés en boule, plantes aromatiques, chênes courbés par le vent, blés sauvages, myrtes et platanes orientaux. Et avec un peu de chance on lèvera un lièvre, des perdrix, des huppes fasciées ou l'on surprendra une chouette endormie, le tout sous le regard narquois des chèvres ! Découvrir Tinos par les sentiers suppose 3 opérations :
– leur dégagement et leur entretien, sans négliger le remontage des murs de pierre sèche éboulés ; cela suppose, après un première remise en état un travail de contrôle et de réparation continu ;
– leur balisage ou le complément de leur balisage et l'édition de cartes et d'itinéraires de type GR ou PR français et l'entretien de ce balisage ;
– l'information écrite et iconographique des points remarquables invitant à la découverte et à la compréhension de la nature et de l'agriculture des Cyclades, sans négliger l'approche anthropologique. Cette information, écrite en grec, français et anglais, pouvant être complétée par la lecture de QR codes, doit être portée par des supports à la fois solides, discrets et en consonance avec le milieu ; il n'est pas question d'imposer un commentaire, une vision magistrale prononcée ex cathedra mais de donner des clés de compréhension au visiteur afin qu'il devienne un acteur de sa visite. Je renvoie ici aux deux itinéraires que Sylvie et moi avons parcouru fin octobre 2016, l'ancienne voie vénitienne allant d'Exombourgo au port de San Niccolo (Chora actuelle) et le sentier Falatados – Manganari – Falatados. Le réseau des sentiers doit être matérialisé à Exombourgo par une structure porteuse des descriptions sommaires de ces itinéraires de découverte et d'indications pratiques, parking, niveau de difficulté, possibilités de restauration, points d'eau situés sur le sentier... Le nombre d'itinéraires possibles étant très important, il faut imaginer une montée en puissance faisant suite à l'information des 10 sentiers balisés existants et mentionnés par la carte Anavasi. Là aussi j'imagine cette structure en position d'accueil.
Le renvoi vers les partenaires 
C'est le troisième pilier. Située elle aussi à Exombourgo, cette structure comparable aux deux premières devra donner une description sommaire de chaque collection, édifice ou pratique géré par un partenaire et des informations opérationnelles, horaires, téléphone, langue parlée, etc., le tout dans un souci de coopération et de valorisation mutuelles. Le lien avec le réseau des sentiers sera naturellement opéré : qui visitera les sites archéologiques d'Exombourgo se verra proposer un prolongement/approfondissement de sa visite in situ par un renvoi vers le musée archéologique de Chora ; le sentier Falatados – Manganari – Falatados permet la découverte d'un moulin à eau, l'information de ce moulin renverra vers des biotopes similaires conservés à Agapi ou à Perastra. ; les pigeonniers que l'on rencontre sur de nombreux itinéraires (Tinos en renferme un millier) renverront vers les vallées de pigeonniers valorisés et signalés de Tarampados ou d'Agapi.
Une gestion démocratique
Une toute petite équipe peut gérer une telle structure. Elle doit être encadrée par une association fonctionnant démocratiquement réunissant les responsables politiques (maire de Tinos et conseillers d'Exombourgo), un représentant du ministère grec de la culture, les partenaires conservant et valorisant édifices et/ou collections, les Jésuites propriétaires du sanctuaire d'Exombourgo. Ce conseil détermine la ligne culturelle de l'institution : expositions à envisager, sentiers à informer, partenariats à engager, communication. Il est habilité comme personne morale à solliciter des financements publics et privés. Cette association s'appuie sur un conseil scientifique consultatif composé d'érudits, d'universitaires et de professionnels du patrimoine.

Les enjeux 

Comme il est écrit en préambule, Tinos est à la croisée des chemins. Pour se développer harmonieusement l'île peut adopter un modèle différent de celui de Myconos. Nos voisins de Siphnos et d'Andros toute proche ont parié sur le développement du tourisme pédestre. Sans dénaturer leur environnement, sans perdre leur âme pour une poignée d'Euros... Allons plus loin sur le sentier qui monte ! 

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