lundi 30 mars 2020

Tinos confinée

Depuis le lundi 23 mars la Grèce est strictement confinée à cause du coronavirus bien sûr, mais ici l'épidémie pourrait faire des dégâts humains bien plus considérables qu'en Europe du Nord. Les causes ? D'abord la destruction du système de santé public imposée par les créanciers - la Grèce ne dispose que de la moitié de la moyenne européenne de lits de soins intensifs - ensuite la présence sur le sol grec de 60 000 - 70 000 réfugiés bloqués dans le pays à la suite de la crise de 2015 et parqués dans de sinistres camps fermés et surpeuplés, pudiquement baptisés hotspots dans lesquels la maladie pourrait se développer dans des conditions effroyables.
Les deux faits sont au passif de l'Union européenne, de son égoïsme dicté par les pays du groupe de Visegrad, de son ordo-libéralisme dicté par l'Allemagne et ses épigones. Egalement au passif de la Turquie d'Erdogan qui utilise le malheur des hommes pour pousser ses pions sur l'échiquier du Moyen-Orient.

Tinos est confinée : comme en France seuls les commerces de première nécessité sont ouverts,  et je donne ici des images issues du blog de la mairie, TinosToday, montrant la ville de Chora vidée, inactive. Ici aussi le risque est grand : les 8000 habitants de l'île n'ont pour tout recours que le centre de santé local qui ne dispose pas de lits de réanimation et l'hôpital de Syros en triste état, avec transport par la vedette des gardes-côtes. Espérons que la maladie ne touchera pas nos Cyclades fragiles, démunies ! Il n'y a pas de cas déclaré à ce jour, le trafic maritime est très réduit et seuls les habitants permanents de Tinos coincés sur le continent peuvent embarquer à Rafina.

Le port de pêche vide de bateaux

Le quai face à la rue Evangelistria

La route d'Agios Phokas

Nouvelles de Lesbos

Le père Maurice Joyeux, présent à Lesbos auprès des réfugiés envoie ce message à ses contacts :


Chers amis,

Mortaza est un ami journaliste afghan qui travaille pour ARTE et bien d'autres réseaux d'informations. Il a un grand courage. 
Nous sommes ensemble à Lesvos/Moria pour lutter contre l'abandon total des milliers de réfugiés , familles, femmes et enfants sur place. Nous faisons ce que nous pouvons ... 
Merci de relayer vers les plus hauts décideurs et marqueurs d'opinion ce court article écrit par Mortaza : deux pages envoyées hier et diffusées dans "Le Courrier des Balkans" . 
Avec les réfugiés tout à fait conscients de l'abandon chaque jour plus précis de tous, avec l' Eglise Catholique, le pape François , le cardinal Hollerich, président de la conférence épiscopale d' Europe, nous appelons depuis plusieurs semaines à la mise en oeuvre d'urgence d'un " CORRIDOR HUMANITAIRE et SANITAIRE EUROPEEN"


Maurice Joyeux sj

Je publie donc le texte de Mortaza, conscient néanmoins du faible écho de mon blog. Je pense que tout commentaire est inutile ...

Le camp de Moria - mai 2017


Grèce : l’enfer du camp de Moria face à la menace du coronavirus
 Courrier des Balkans  |  De notre envoyé spécial à Moria  |   mercredi 25 mars 2020



Le camp de réfugiés de Moria, sur l’île de Lesbos, est une bombe à retardement. Alors que le confinement a été décrété par les autorités grecques pour ralentir la propagation du Covid-19, plus de 20 000 personnes s’entassent sous des tentes de fortune, sans eau, sans savon et parfois sans électricité. La peur rode et la violence est inévitable. 

Par Mortaza Behboudi
 Comment confiner le plus grand camp de réfugiés d’Europe ? Depuis une semaine, les volontaires des ONG qui travaillent dans le complexe de Moria sont en quarantaine et, depuis lundi, le confinement a été décrété par le gouvernement grec. Alors que plus de 20 000 réfugiés s’entassent dans l’île de Lesbos, la situation sanitaire déplorable fait craindre une progression rapide de l’épidémie de Covid-19. La Grèce dénombre officiellement 695 personnes touchées par la maladie, et 17 décès sont déjà à déplorer, mais ces chiffres pourraient rapidement augmenter. Dans le camp de Moria, des milliers de tentes sont installées les unes à côté des autres, et les migrants dorment serrés comme des sardines. L’entrée dans la zone est interdite aux organisations humanitaires et aux visiteurs depuis quelques jours, mais il est toujours possible d’y pénétrer en se faisant passer pour un réfugié. Les habitants du camp tentent de survivre, sans médicament, parfois sans eau et sans électricité. Ici, on manque de médecins, mais aussi de savon pour se laver les mains.
Le camp de la Moria ne dort jamais et la violence couve au sein de la population. La police grecque préfère ne plus intervenir. Certains sont ici depuis des mois voire des années, les procédures de demande d’asile traînent et s’éternisent. « Nous ne pouvons pas dormir quand l’obscurité tombe. Des hommes viennent avec des couteaux pour nous voler ce qu’il nous reste. Mon mari est électricien, il travaille bénévolement pour une ONG, ici, dans le camp de Moria. Mais cela lui cause des problèmes, des gens nous menacent pour qu’il les raccorde au réseau électrique », raconte une mère de famille afghane.
Si on ne fait rien, beaucoup de gens vont mourir avec le coronavirus. Ils nous ont abandonné mais on ne baisse pas les bras.
Désormais, toutes les entrées du camp sont surveillées par la police grecque. Personne ne peut sortir, sauf les personnes ayant des rendez-vous médicaux dans le centre de Mytilène. Aucun médecin ne travaille dans le camp le week-end et la permanence de Médecins sans frontières (MSF) est restée fermée durant deux jours. Dans ce chaos, quelques réfugiés ont commencé à construire une clinique de fortune pour accueillir ceux qui ne manqueront pas d’être atteints par le Covid-19. Quatre personnes ont déjà contracté la maladie sur l’île de Lesbos et tout le monde redoute que la pandémie se propage dans le camp, où l’hygiène est désastreuse. Deux cas suspects ont bien été identifiés parmi les réfugiés du camp de Moria, le 12 mars dernier, mais ces derniers se sont finalement avérés négatifs. Ce qui n’empêche pas la peur de roder, surtout parmi les personnes âgées. « Le coronavirus est déjà là mais personne n’en sait rien car nous n’avons pas les moyens de le détecter », raconte une migrante congolaise, arrivée depuis quatre mois. « Il faut faire la queue trois ou quatre heures pour voir un médecin. Il faut faire la queue pour tout, pour manger, pour prendre une douche ». Certaines femmes ont commencé depuis la semaine dernière à coudre des masques de protection, mais ces derniers ne sont pas efficaces, expliquent les volontaires de MSF. En attendant, les enfants jouent dans les poubelles ou restent prostrés dans leurs tentes, puisque les écoles ont fermé depuis deux semaines. « Si on ne fait rien, beaucoup de gens vont mourir avec le coronavirus. Ils nous ont abandonné, mais on ne baisse pas les bras. Je suis jeune et fort mais il nous faudrait au moins de l’eau et du savon »,
continue un demandeur d’asile somalien, qui aide à monter l’hôpital de fortune.

Il faut évacuer les réfugiés vers le continent pour lutter efficacement contre la propagation de l’épidémie.
Il est interdit de filmer et de photographier à l’intérieur du camp. Les réfugiés peuvent se voir refuser leur demande d’asile si une image est diffusée sur les réseaux sociaux. La police n’hésite pas à casser les portables de ceux qui veulent filmer leur vie quotidienne. « Je veux parler de ce qui se passe ici, de la situation désastreuse du camp. Nous ne vivons pas bien, il ne faut pas cacher cela », veut croire Olivier, un journaliste congolais arrivé à Lesbos il y a quatre mois. Lundi matin, un bateau est encore arrivé à 7h du matin avec plus de 50 migrants à son bord. Mais les autorités grecques n’acceptent plus aucune demande d’asile depuis début mars. Ces derniers vont donc être directement transférés au nord d’Athènes, dans le camp de Malakasa. Depuis lundi matin, les migrants du camp de Moria n’ont également plus l’autorisation de se rendre en ville. Il n’y a plus aucun transport, sauf des taxis, qui sont autorisés à prendre une seule personne, et seulement pour aller à l’hôpital. Depuis début mars, les migrants qui arrivent sur les îles grecques sont séparés des migrants déjà présents sur place, afin d’éviter une propagation de l’épidémie de Covid-19. MSF le répète inlassablement aux dirigeants européens : évacuer les réfugiés vers le continent et vers d’autres pays de l’Union européenne est indispensable pour lutter efficacement contre la propagation de l’épidémie.

dimanche 29 mars 2020

Tympans chypriotes

Sylvie et moi avons passé récemment dix jours à Chypre, dans le massif du Troodos à l'ouest de la grande île.
Le Troodos renferme une dizaine d'églises byzantines classées au patrimoine mondial de l'UNESCO et datées du XI e au XVI e siècles. Leur intérêt majeur réside dans les fresques dont leurs murs intérieurs sont ornés.
Eglise de l'Archange Michel - Le saint local Agios Mamas


Mais certaines églises présentent des tympans au dessus des portes et des fenêtres comparables formellement à ceux des maisons paysannes de Tinos et des églises de villages.

Tympan au monastère de Néophytos

Manifestement ces tympans sont à Chypre issus de la transenne byzantine - une plaque de pierre ajourée faisant office de vitrail - et ne sont pas sculptés : différence notable avec ceux de notre île. La fonction de ces tympans est aussi différente : à Chypre ils permettent l'éclairage de l'église, à Tinos ils tamisent la lumière des maisons durant la période d'élevage des vers à soie, comme l'indique Markaris Salonis en 1809 et récemment l'ethnologue Alekos Florakis.
Mais on retrouve ce morceau d'architecture dans deux territoires pourtant éloignés : un cousinage qui témoigne de la vaste culture hellénique !



Saint Nicolas du Toit

Saint Nicolas du Toit - Transenne de la porte ouest

Panagia Asinou


Pangia Asinou - Tympan de la porte est

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